Prejudices ain't my thing | Ragnar

ALOHOMORA

Le froid traversait sa tenue de Quidditch avec une facilité déconcertante mais Narjiss semblait à peine s’en préoccuper tandis qu’elle était perchée sur son balai, batte reposant fermement dans la paume de sa main. L’équipe des Sleipnir avait été divisée en deux pour se mettre dans l’esprit d’un match et Narjiss ne quittait pas Catrina des yeux, l’autre batteuse, et à raison. En effet, la jeune blonde vint à décocher un brillant coup, un cognard se dirigeant de façon précise vers l’un des poursuiveurs de l’équipe de Narjiss. La jeune femme fit descendre rapidement son balai en piqué et vint se placer devant son coéquipier afin de dévier l’attaque. La jolie brune adressa un sourire éclatant à Catrina, accompagné d’un clin d’œil puis fit tourner sa batte sur elle-même en guettant l’autre cognard du regard. Si Narjiss était discrète à Durmstrang, sur un terrain de quidditch elle semblait enfin relâcher la pression et se laisser aller à ses émotions. Pour dire vrai, elle ne faisait guère peur aux autres équipes et si ces cognards étaient précis, ils manquaient cruellement de puissance. Cependant, contrairement à d’autre, Narjiss semblait se préoccuper davantage de la sécurité de l'équipe que d’elle-même et cela en faisait une protectrice hors pair, tant et si bien que ses coéquipiers lui faisait une confiance totale et ne s’occupait que peu des cognards, étant ainsi beaucoup plus concentrés sur leur tâche.

L’entraînement continua bon train pendant encore une heure, avant que Narjiss pose enfin pied à terre. Elle salua ses équipiers avant de rejoindre le coin où elle avait posé ses affaires, lieu que Ragnar Ostergard semblait occuper également. Si Narjiss ne le connaissait pas personnellement, il fallait dire que sa réputation le précédait et ce n’était pas une réputation des plus glorieuses qui étaient montée jusqu’aux oreilles de la jeune femme. En effet, la jolie française avait dans ses amies deux jeunes filles, qui étaient passées dans ses mains…expertes. Point commun qui s’était soldé par une violente dispute entre les deux élèves qui acceptait mal de ne pas avoir le monopole de l’Ostergard. Cependant, Narjiss n’était pas femme à s’attacher aux ragots qui fusaient dans Durmstrang et était encore moins du genre à avoir des préjugés sur les gens. Après tout, on passait son temps à la juger ici et elle savait mieux que personne que cela n’était gère réjouissant. Alors elle s’avança vers lui, préférant le considérer simplement comme un batteur d’une équipe adverse, et ramassa son manteau qui était aux pieds du jeune homme avant de l’enfiler. Après l’effort, il valait mieux se couvrir si on ne voulait pas attraper un rhume fulgurant, le froid ne pardonnait pas à Durmstrang.

« Alors, vous êtes venus pour nous jauger ? » dit-elle avec un sourire en coin et un fond de taquinerie dans le regard.

Si elle n’avait pas craint de lui adresser la parole, c’était avant tout parce qu’elle avait finit par apprendre (de la dure façon) qui était les sangs pures intolérants des autres plus ouverts et elle ne se souvenait pas que Ragnar fasse parti de la première catégorie. Cependant, elle avait préféré le vouvoyer, pour garder une certaine distance, car elle savait aussi à quel point les familles glorieuses de l’école s’attachait à l’étiquette. Chose qu’elle avait bien du apprendre au fil des mois à Durmstrang et qui lui changeait tellement de la France, plus particulièrement de Beauxbatons où tout le monde se considérait égaux, passant leur temps à se tutoyer les uns les autres.

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Il faisait froid en Janvier. C'était le problème scandinave. Plutôt que de se battre en royaux, ils auraient mieux fait de régler ce petit détail qui rendait notre vie tout entière plus froide, plus terne, moins heureuse et plus morne de jour en jour. Il n'y avait pas de mal à rêver d'un temps plus chaud. Chaque année, les suédois se baignaient dans un lac glacé. Que c'était drôle et amusant... Consanguins. La noblesse de mon bon pays, représentée par les Ostergard et autres clans, se refusait à pareille bassesse. Pourquoi se baigner dans une eau gelée alors que l'on rêvait tous de Miami ou du soleil monégasque. C'était une folie, une hypocrisie visant à faire croire au reste du monde quel bonheur il y avait de vivre dans un pays éternellement froid. Je me demandais encore pourquoi j'avais accepté de continuer mes études dans un trou pareil. Surement que je m'y étais fait, comme tous les camarades nordiques.
Aussi, des choses comme "bronzer" ou "brun" étaient des mots qui pour nous signifiaient peu et faisaient beaucoup fantasmer. J'aimais à dire que la plus belle femme du monde devait être brune. Peut-être du fait que j'avais tapé dans tellement de blondes que je devais avoir touché le spectre chromatique blond en entier. Ce qui en soi ne m'avait jamais gêné. On ne choisit pas une femme pour ses cheveux. C'est un critère important lorsque tu vas au lit avec elle. Mais dans le cas d'une brune, cela voulait dire beaucoup de chose. Qu'elle n'était pas suédoise, qu'elle ne venait pas de Scandinavie -ou qu'elle était fille d'adultère, ce qui ne donnait pas beaucoup d'avenir à cette fille- et qu'elle était exotique pour nous. Si tu rajoutais à ça qu'elle était métisse, des yeux sombres et magnifiques, et tu obtenais l'un des trésors de Durmstrang. Une fille sur 1000 tenaient de cette description. Quelle était la chance pour que celle-ci soit Batteuse dans une des équipes de Quidditch ?
Je devais être quelqu'un de chanceux.
J'étais venu très tôt ce matin là, pour éviter l'ambiance dans l'école qui me donnait envie de vomir. Cette préparation excentrique pour le Bal de l'Eau qui se tenait le soir même. J'étais donc parti m'éclipser, et comme je m'ennuyais ce jour là, regarder un peu de Quidditch. J'avais vu défiler les Zmeï devant moi, mais je m'étais endormi, le froid du vent et la chaleur de mon manteau créant un contraste qui me faisait somnoler. Je m'étais réveillé pendant que les Sleipnir rentraient sur le terrain. Ils avaient déposé leurs affaires sur les gradins un peu partout. J'avais alors vu cette princesse étrangère -ça ne pouvait être que ça. Qui enverrait une fille qui n'a pas la peau blafarde au nord-est ?- et j'avais pris place près de ses affaires, après qu'elle soit partie. Je tenais l'occasion d'en apprendre plus à son sujet, et j'espérais qu'elle ne me tiendrait pas rigueur de mes manières. Elle était arrivée il y a moins de six mois, et mon temps libre je l'avais passé à éviter ma future-ex-fiancée et à me calmer les nerfs sur quelques filles inintéressantes.
Bref je n'avais pas eu le temps de rencontrer cette jolie fille, qui jouait plutôt bien. Pas vraiment de force de frappe, mais un esprit protecteur qui me semblait intéressant. C'était à peu près l'esprit que j'avais donné à mon dernier match contre les Rusalka, et je trouvais amusant que certains joueurs ne jouent que comme ça. Elle palliait ainsi sa faible puissance par une précision et jouait comme un bouclier pour ses partenaires. Ce n'était bien sur pas ma façon de faire mais j'appréciais la technique. L'entraînement se finit bien assez tôt et je la vis arriver. Elle souriait et s'habilla rapidement d'un grand manteau. Ce serait pour une autre fois que je ausculterais de plus près. C'était un joli bien de fille, assurément. Une merveille qui n'était pas née par ici.
-Alors, vous êtes venus pour nous jauger ? Je relevais la tête pour me mettre au niveau de la sienne, un sourire aux lèvres.
-Que voulez-vous, sois près de tes amis, encore plus près de tes ennemis. On ne reste pas la meilleure équipe de Quidditch sans savoir ce que font les autres ! Très jolis mouvements en passant.
J'avais bien envie de faire la causette, et il était encore assez tôt pour que je n'aie pas à me préparer pour le Bal avant plusieurs heures. Il était donc très appréciable qu'elle commence la conversation. Ça changeait des autres filles.

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De toute évidence, Ragnar ne semblait définitivement pas aussi horrible que ce qu’on avait pu lui en raconter. Il semblait plutôt gentil et inoffensif, comme ça, à première vue. Il suffisait d’écouter sa réponse où il la complimentait même sur son jeu, ce qui ne manqua pas d’arracher un sourire à Narjiss, pour se dire que le sang pur n’était pas le moins du monde antipathique. Alors peut être que ce n’était là que son jeu pour approcher les femmes et leur faire croire à un être qui n’existait pas mais Narjiss était bien trop altruiste pour croire à une pareille tromperie. Au contraire même, elle se réjouissait d’avoir rencontré un autre sang pur qui, comme Ludwig, ne semblait pas s’attacher davantage à cette histoire de sang. Mais, après tout, peut être que Ragnar n’était même pas au courant que le sang qui coulait dans les veines de Narjiss n’avait rien de magique ou de noble. Peut être qu’il la prenait pour une descendante de Sultan, d’Emir ou autre titre de noblesse du monde musulman. Mais elle n’était rien de tout cela, elle n’était qu’une enfant sûrement non désirée, un rejeton abandonnée qui avait finalement été adoptée par une famille française, elle ne connaissait rien de ces origines et elle pourrait découvrir qu’elle est une fille de prince qu’elle ne s’en vanterait pas. Elle préférait encore s’élever par elle-même que profiter du statut que d’autres ont gagnés.

« Merci mais je crois que vous n’avez pas de soucis à vous faire. Le match contre les Rusalka était passionnant et je ne suis pas pressée de me retrouver face à vous. » dit-elle avec un éclat de rire.

Car évidemment, Narjiss n’avait pas loupé le match entre les deux équipes. Assise dans les gradins elle avait observé avec attention, elle aussi, la stratégie des autres batteurs. Du peu qu’elle avait vu, Ragnar misait sur sa force et il était certain qu’il en avait. Il en avait même tellement que Narjiss ne donnait pas cher de sa peau si un de ses cognards la touchait. Il allait donc falloir qu’elle soit très attentive lors du match qui les dresserait l’un contre l’autre. La jeune femme releva la tête tandis qu’elle entendait un éclat de rire un peu plus loin, hilarité de deux élèves en GRIVE tout comme elle et voir ces deux jeunes filles s'échanger des ragots en riant lui rappela de manière un peu douloureuse qu’un grand événement avait lieu ce soir. Le bal des Rusalka. Arquant un sourcil, elle détache ses cheveux, auparavant retenue en une queue de cheval pour les besoins du sport, avant de demander curieuse, passant une main dans ses longueurs brunes pour les remettre en place :

« Vous n’allez pas au bal ce soir ? ou est ce que vous avez laissé le soin à votre cavalière de régler les dernier détails ? »

Car il n’était pas rare de voir des jeunes femmes paniquées en apprenant que leur cavalier avait choisi tel couleur de costume qui n’allait pas du tout avec leur robe. A vrai dire, ce genre de propos et d’échanges potins-chiffons fusaient de partout dans les chambres des demoiselles de Durmstrang. Au plus grand dam de Narjiss qui, de toute manière, n’avait même pas prévu d’y aller. Pas de robe, pas de cavalier et puis elle n’en avait surtout pas l’envie.

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Elle tenait à faire la conversation ! Encore une fois les Sleipnir se montraient originaux. Ils possédaient de très bons éléments, et des moins bons. Passons sur Sonja. La petite batteuse en face de moi était agréable et en plus elle me complimentait. Enfin je le voyais comme ça vu son sourire. C'était très sympathique de voir que des gens te respectaient, j'en attendais pas autant en me réveillant ce matin. Bien sur j'avais l'habitude qu'on me respecte, et bien plus qu'on me craigne. J'avais cette réputation en ma défaveur, mais ça m'arrangeait bien la plupart du temps. Je ne voulais surtout pas que les gens essaient de me comprendre. Ils étaient bien trop infimes, bien trop petits. Avais-je écrit sur mon front ce que les français appellent leur "Mère Thérésa" ? J'étais un leader, le Loup Alpha de la meute. Aussi que cette étrangère me parle ainsi me faisait on ne peut plus plaisir. Décidément le Bal de l'Eau n'avait pas commencé que je passais déjà un moment assez agréable.
-Merci mais je crois que vous n’avez pas de soucis à vous faire. Le match contre les Rusalka était passionnant et je ne suis pas pressée de me retrouver face à vous.
-Charmante, j'essaierais de ne pas frapper trop fort si je dois vous viser ! Je souriais à pleine dent. Il fallait donner une bonne image du terrible Ragnar Ostergard.
Elle me parla presque aussitôt du bal. Ah le Bal... J'avais initialement prévu d'y aller et de battre mon record de filles avec qui j'avais couché. Mais j'avais complètement changé de plan après les problèmes avec Bouclette, la petite potion concoctée par Paulina et surtout le fait qu'on m'oblige à y aller avec Sonja. Ce serait assurément une soirée compliquée. Il faudrait que j'évite la rousse, que je la laisse à mon vieux colloc et ami, et que je parte chasser le plus vite possible. A moins que... J'avais décidé depuis peu de calmer les choses en matière de drague. Et la jolie batteuse m'intriguait.
Je me disais qu'on pouvait continuer cette conversation, et je lui indiquais de la main la place vide à ma droite. Vide comme 99% du stade de Quidditch.
-Vous avez quelque chose à faire ? Sinon je pourrais vous accaparer votre temps histoire de parler ? Je devine à l'accent, au joli minois et à la façon de frapper un cognard que vous n'êtes pas d'ici. Je suis on ne peut plus curieux vis à vis de vos origines mademoiselle... ?

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Plus Narjiss parlait avec lui et plus elle essayait de comparer l’homme qu’elle avait sous les yeux de celui qu’on lui avait conté. On l’avait décrit hautain, un peu solitaire, parfois même cruel et pour l’instant elle ne trouvait aucun de ces aspects sous ses yeux, bien au contraire. Mais on l’avait également définit comme un bel homme, séducteur et si pour le premier point elle n’avait pas eu besoin de venir lui parler pour s’en rendre compte, le deuxième point ne semblait pas non plus aller avec le personnage. A moins que sa technique de séduction soit bien trop subtile pour que Narjiss s’en rende compte, peu habituée à être le centre de ce genre d’entreprise ou n’y portant même pas attention. Certes, on avait déjà tenté des approches sur elle, elle se rappelait avec humour les tentatives de Siv il y a quelques mois mais, la plupart du temps, la jeune femme semblait complètement aveugle, surtout depuis que son cœur commençait à battre pour une certaine personne. Le charme, la séduction était donc bien souvent des choses qu’elle prenait pour de la gentillesse et de l’altruisme, elle pouvait être bien naïve…
Elle s’assit quand il lui montra le siège vide à ses côtés et elle resserra son manteau autour d’elle pour conserver le peu de chaleur que son corps produisait, un sourire se dessina sur les lèvres de la jeune femme tandis que la curiosité de Ragnar pointait. Elle ne s’en formalisa guère, elle n’était pas du genre à vouloir cacher ses origines ou à mentir sur qui elle était. Elle répondit alors avec un sourire en coin :

« Bel-Ami. Narjiss Bel-Ami et ne vous inquiétez pas, je ne vous ferais pas l’affront de vous demander le vôtre. J’ai déjà entendu parler de vous. »

Elle n’en dit pas plus, il prendrait certainement mal le fait qu’elle ait entendu des choses peu… nobles à son sujet, à moins que le jeune homme soit, tout comme elle, peut intéresser parce qu’on colportait à son sujet. Elle reprit alors, pour contenter sa curiosité sur la présence d’une demoiselle qui rentrait si peu dans le décor de Durmstrang.
« Je suis française … » et consciente que sa couleur de peau ne semblait pas coller avec l’idée qu’il devait se faire d’une française, elle rajouta : « enfin, je suis marocaine de naissance et j’ai été adoptée par un couple français. » elle observa son visage, tentant de déceler sa réaction avant de continuer : « Et vous pouvez me tutoyer, vous savez ? Je ne suis pas vraiment le genre de personne envers qui on doit marquer du respect ici : adoptée, moldue, étrangère…. A croire que je collectionne tout ce que certains élèves semblent mépriser » finit-elle avec une pointe d’ironie. Les beaux yeux bruns de Narjiss, s’attardaient sur les traits de Ragnar, guettant, attendant patiemment qu’il se lève en découvrant qu’elle n’était pas une princesse d’une contrée lointaine et qu’elle ne valait décidemment pas la peine de la connaitre.

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-Narjiss Bel-Ami et ne vous inquiétez pas, je ne vous ferais pas l’affront de vous demander le vôtre. J’ai déjà entendu parler de vous.
Je ne sais pas ce qu'elle savait exactement de moi, mais elle savait comment me parler ! J'aimais deux choses plus que le sexe dans ma vie. Qu'on me complimente et qu'on dise qu'on a entendu parler de moi. J'avais eu la première un nombre incalculable de fois, de la part de mes parents, des professeurs, des tuteurs, de mes conquêtes. La seconde passait pour devenir rare. En effet tout le monde avait entendu parler de moi. Mais peu osaient le dire. Déjà car généralement ils n'étaient pas vraiment fiers de me parler du coup, encore moins de m'avouer toutes les méchancetés qu'on disait à mon sujet. Pourquoi avoir peur de la vérité ? Oui j'étais manipulateur, pas vraiment philanthrope et j'aimais les femmes. Ça ne faisait pas de moi un sale type. J'avais connu des royaux bien plus désagréables, bien plus dégueulasses avec les moldus et autres sang-mêlés, et j'avais moi-même du me défendre à coup de poing et de baguette contre des sales cons royaux.
Bref, la petite nouvelle me faisait chaud au cœur, et mon orgueil n'en était que plus gonflé.
Il ne me restait plus qu'une chose à faire.
Je me lève d'un coup, ne la regarde même plus. A mon avis, elle ne doit pas bien aimer les sang-purs qui se la pètent et qui insultent des sorciers comme elle. Je n'avais pour ma part aucun ressenti vis à vis des sang-mêlés. Je n'aimais pas spécialement qu'on squatte mon école, mais je m'y sentais de plus en plus étranger de toute façon, avec toutes ces guerre pour la Couronne. Elle pensait donc surement comme moi. Raison de plus pour lui faire croire une minute que je n'étais qu'un bâtard royal qui haïssait les sang-de-bourbes.
Je me retournais enfin vers elle, pour faire un grand sourire et me mettre à genoux devant elle. Je lui tiens la main et dis :
-Alors je suis honoré de te rencontrer, Narjiss Bel-Ami. Puisses-tu rester pour toujours si jolie et innocente. Je laisse éclater un petit rire.
C'est amusant d'agir ainsi. Pas de drague violente, de sous-entendu salace qui laisserait entendre que ma baguette rentrerait bien dans le fourreau de la demoiselle dans les vestiaires durant le prochain match. Pas d'allusion douteuse à sa jupe de sport ou à son fessier relevé lorsqu'elle est sur le manche de son balai. Non pas de tout ça. Juste de la gentillesse et de l'humour. Ma nouvelle démarche me paraissait sensée, et valait le coup d'être testée. Pourquoi pas devenir aimable ? C'est Ulrich qui ne me reconnaîtrait pas !
-Dis quelque chose, j'ai l'air con là comme ça ! Mon sourire laisse entrevoir mes dents blanches. Chose très rare à mon avis.
J'avais eu envie de l'appeler "Love", chose que j'adore faire aux filles que j'affectionne. Ça attendra un peu, peur de la brusquer.

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La réaction du jeune homme ne se fit pas attendre et elle fût déçue de le voir se lever rapidement après qu’elle lui eut révélé sa véritable nature. Alors cette histoire de sang comptait également à ses yeux ? La jeune femme en était amèrement désappointée et elle se mordit la lèvre inférieure pour ne pas le montrer. Narjiss détourna les yeux, pour ne pas le voir s’en aller, après tout elle avait déjà eu droit à ce spectacle, à ce genre de fuite un bon nombre de fois et elle ne voulait guère y faire face de nouveau. Les esprits changeraient-ils un jour ? Elle en doutait. Elle soupira un peu, souffrant qu’on puisse la fuir ainsi à cause de choses si futiles. Il semblait pourtant bien s’entendre, pourquoi changer ainsi du tout au tout ? Mais il fallait qu’elle se rende à l’évidence, sa différence était insurmontable pour certaine personne et la jolie brune allait bien devoir s’habituer à ce genre de comportement. Ici, être ouvert et gentil ne rimait à rien si on n’avait pas le sang bleu qui allait avec. Tout cela était affreusement ridicule.

Mais à sa grande surprise, Ragnar fait volte face, lui offre un sourire resplendissant avant de s’agenouiller devant elle. Narjiss, surprise, ne peut rien faire d’autre que lui rendre son sourire tandis qu’elle comprend que tout cela n’était qu’un vilain tour et elle l’écoute la complimenter. Le rose lui monte aux joues, la jolie demoiselle étant peu habituée à recevoir des compliments et elle détourne le regard avec un léger sourire. Enfin découvrait-elle le côté charmeur de Ragnar qu’on lui avait tant décrit et elle comprenait mieux pourquoi ses camarades avaient cédés à cet homme. Mais Narjiss n’était pas de ce genre et si elle appréciait la galanterie, elle appréciait aussi que cette dernière n’aille pour l’instant pas trop loin. Trop peu habituée, elle ne saurait certainement pas comment y réagir. Pire encore, elle ne voulait pas encouragé Ragnar car, après tout, le cœur de la demoiselle était déjà pris et elle n’était pas femme à se donner au premier venu. La voix de Ragnar s’élève de nouveau et l’hilarité pointe sur le visage de la jeune femme qui se met alors à rire de bon cœur avant de lui répondre, amusée, posant son autre main sur celle du jeune homme par réflexe :

« Mon cher Ragnar, tout le plaisir est pour moi. »

Retrouvant finalement son sérieux, les yeux de Narjiss se perdent de nouveau sur les traits du jeune homme avec un léger sourire de reconnaissance. Elle voudrait le remercier d’être aussi ouvert et compréhensif mais n’ose pas, finalement, elle se remet à rire avant d’enlever la main qui s’était posée sur celle du jeune homme :

« Et relevez vous donc, je crains que de loin on se pose des questions sur vos attentions… »

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Je l'avais fait rire. Ouah, ça c'était pas mal. Finalement j'avais peut-être un avenir dans le One Man show. Il ne fallait pas sous estimer le rire. Parfois une femme qui te paraissait inaccessible se met à rire à une blague que tu pensais nulle, et te voila propulsé dans son lit, et elle à crier ton nom toute la nuit. C'était déjà arrivé.
-Et relevez vous donc, je crains que de loin on se pose des questions sur vos attentions…
Je m'exécute, bien content d'avoir réussi ma surprise. On est en bon terme, on parle tranquillement côte à côte et on ne passe pas notre temps à se plotter, cette relation est donc plus saine que 99% de celles que j'ai eues avant. Je peux me relaxer, le contact passe bien, elle ne risque pas de partir après avoir été vexée. En tout cas j'espère.
Il y avait chez Narjiss quelque chose de charmeur, d'attirant au possible qui émerveillait mes yeux et me donnait envie d'aller plus loin. Mais cela faisait moins de cinq minutes qu'on se connaissait. C'était tout simplement une belle femme, il ne fallait pas se leurrer. Mais c'était une compagnie très agréable. Ce qui l'était moins, c'était de repenser au Bal.
-Sinon pour répondre à votre question, je vais au bal, normalement, s'il n'y a pas d'heureux miracle, avec ma... "fiancée", Sonja Ellstörm. J'essayais de ne pas trop montrer mon mépris pour cette paysanne.
Il ne fallait pas que je paraisse dédaigneux ou même haineux.
-Ce mariage arrangé ne nous arrange ni l'un ni l'autre, et j'ai bon espoir de le voir brisé sous peu. Aussi, puisque le bal n'enchante pas particulièrement cette fille, elle n'osera peut-être pas venir, me laissant ma soirée... Espérons.
J'espérais surtout qu'elle ne viendrait pas car elle se serait pendue. Je ne voyais pas d'autres solutions à ce mariage qui arrangeait si bien nos deux familles. Les Ostergard avaient besoin de consolider leur place de grande noblesse, et les Ellstörm avaient vraisemblablement besoin d'argent vu l'allure de leur fille. Ce qu'il me fallait c'est une bonne raison de briser ces fiançailles. Et si j'étais odieux ? Non aucune chance... Et si je faisais honte à tel point que toute l'école sache que je me fichais des paysans et de leur fille rousse ? Ils n'auraient pas le choix... Un plan se dessinait dans ma tête. Ce soir, je devrais conclure avec une fille; un baiser long et passionné devant plusieurs têtes colporteuses. C'était mon salut, ma libération.
J'avais encore bon espoir que ce soit Narjiss. La belle brune était magnifique et je me voyais très bien la fréquenter régulièrement. Cela changerait des "Suicidaires", qui n'étaient d'ailleurs plus nombreux grâce à la potion de... Paulina. Oui Paulina pourrait correspondre à mon besoin ce soir également. Mais ce ne serait pas le même genre de baiser, ni de relation ensuite...
-Et vous Narjiss, n'allez vous pas au bal ? Votre robe est-elle prête ?

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La conversation finit par dévier de nouveau sur le bal qui aura lieu ce soir et Narjiss fronçait un peu les sourcils en entendant le mot « fiancée ». Ragnar faisait donc partie de cette jeunesse torturée, forcée à accepter une femme ou un homme dont il n’avait probablement pas envie. Cette tradition qui animait les grandes familles était un profond mystère aux yeux de la jeune femme qui ne comprenait guère l’intérêt de vouloir rendre ses enfants malheureux. Les parents de Narjiss, eux, ne l’auraient jamais accepté mais il fallait croire qu’ici, dans les royaumes du nord, la réputation et l’argent passaient au-dessus du bonheur de leur descendance. Narjiss posait son regard curieux sur Ragnar qui semblait être de son avis sur cette histoire de mariage arrangée, il semblait un peu ombrageux à parler de cette histoire et la belle comprenait facilement sa rancœur. A sa place qu’aurait-elle fait ? Certainement aurait-elle fuit cette alliance insensées, serait partie dans un autre pays, sur un autre continent, elle aurait tout fait pour ne pas se retrouver lier contre son gré mais Narjiss avait sa vision bien à elle de la liberté et y était bien trop attachée. La jeune femme était un peu sauvage par nature et peu encline à baisser l’échine devant n’importe qui.

Ragnar lui demanda alors si elle comptait y aller. A vrai dire non, l’idée d’aller au bal lui avait auparavant donné de l’urticaire : trop de sang bleu, d’air supérieur et on pouvait toujours craindre de voir quelques petits tours joués contre des sangs « impurs » comme ils le disaient si bien. Mais sa rencontre avec Ragnar et Ulrich lui redonnait quelque peu espoir dans les grandes familles de sang pur, ils n’étaient pas tous irrécupérables et avec un peu de chance passerait-elle une bonne soirée. Et au pire, pourrait-elle toujours s’éclipser au cas où le bal se montrerait orageux ou ennuyeux. Dans tous les cas, son esprit commençait à changer doucement d’avis. Narjiss fit la moue pour lui montrer son indécision.

« J’avais pas vraiment prévu d’y aller… trop peur de marcher par inadvertance sur des robes insolentes et de finir ensorcelée ou empoisonnée » dit-elle avec un léger sourire en imaginant déjà les robes moulantes et ultra longues que pourraient porter certaines jeune femme de bonne famille. Apparat extravagant que Narjiss ne pouvait décemment pas s’offrir, à la limite avait-elle une ou deux robes qui trainaient dans son placard mais rien qui ne pouvait rivaliser. « Mais bon, peut-être y ferais-je un tour au moins par curiosité et je pourrais toujours m’éclipser en cas d’ennui ou si je vois que ma vie est en danger » finit-elle dans un éclat de rire. Grelotante, la jeune femme se leva avec un sourire « Sur ce, je suis désolée mais j’ai encore du mal à m’habituer à la température, il va falloir que je m’éclipse si je veux pouvoir être en forme pour ce soir… Peut-être à toute à l’heure alors. » finit-elle avec un sourire en coin et un petit signe de main avant de s’éloigner.

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